Mille et quelques bornes de parcours variés, au guidon d’une Royal Enfield 650 Continental GT, de quoi se faire une bonne idée de ses qualités ?
L’été dernier, faute de pouvoir emmener ma W lors de notre virée dans les Vosges, j’ai largement eu l’occase de me familiariser avec la Royal Enfield 650 Continental GT de Béné. Vous savez déjà tout le bien que j’ai pensé de sa quasi-jumelle, l’Interceptor (sinon lisez l’essai dédié). Toutefois un petit test d’une heure à peine nous laisse toujours sur notre faim… Ainsi cette excursion dans l’est de l’Hexagone, bien plus copieuse, m’a permis d’apprécier les capacités de la frangine de façon plus approfondie ; tout en me laissant encore de l’appétit.
Et pourtant le festin fut panaché : en solo, en duo, de voies expresses en chemins forestiers, cependant très majoritairement sur des départementales sinueuses et assez peu fréquentées. Même sur la fameuse route des Crêtes, nous n’avons pas connu l’affluence des grands jours, malgré une météo disons estivale ascendant caniculaire, cette semaine-là. Alors, que valent les sœurs RE six-et-demi dans ce contexte ? Au moins leur prix, selon moi !
Je ne m’attarderai pas sur les qualités esthétiques de cette gamme (surtout la première génération). J’ai eu l’occase de les évoquer déjà, tout en exprimant un relatif bémol par rapport à certains périphériques (mais rappelons-nous les tarifs de ces machines). Surtout ce n’est pas le sujet ici, aussi je laisse vos yeux juges du look de cette moto néo-rétro. Non, j’aimerais plutôt que l’on se penche aujourd’hui sur le comportement dynamique de l’engin en question.
Son bicylindre en ligne calé à 270 degrés, pour commencer, refroidi par air et par huile, bien que super carré (78,0 x 67,8 mm) et annonçant des performances modestes (47 ch), dispose d’un coffre surprenant car immédiatement disponible. C’est qu’au-delà de la puissance, ce qui compte c’est le couple délivré, particulièrement dans les bas régimes. Les concepteurs de ce twin l’ont visiblement bien compris. Et si la vitesse de pointe en frustrera sans doute, l’important pour moi c’est l’agrément. L’agrément et la sécurité ! Pouvoir s’insérer ou dépasser sans difficulté étant autant grisant que rassurant.
Dans ce registre, la partie cycle joue pleinement son rôle de sidekick. Jamais une frayeur, on prend rapidement confiance dans la tenue de route. Et le freinage offre un bien meilleur ressenti que celui de ma Kawa. La mise sur l’angle, elle, peut nécessiter une sorte d’effort au départ. La faute à la répartition des masses ? Ou bien au choix des pneumatiques ? Je ne saurais dire… Toujours est-il que cette espèce de lourdeur, et du coup d’appréhension, a disparu sans que je m’en aperçoive de suite, après quelques centaines de kilomètres apparemment.
En montant vers le rocher de Dabo, avec en guise de sac de sable ma passagère préférée, j’en étais rendu à attaquer (raisonnablement) avec une joie non dissimulée, façon course de côte. Dans ce sens, c’est d’autant plus facile que le frein moteur se suffit à lui-même en amont des virolos. A la redescente en revanche, aïe-aïe-aïe ! Tout en appui sur les bracelets, avec le poids de deux adultes sur la bécane, les poignets crient rapidement au secours dans les phases de freinage.
C’est l’inconvénient de la version Continental GT ; et l’unique reproche que j’ai à formuler en matière de confort. Seul et à bon rythme, on est aisément porté par le vent et l’accélération. Mais le reste du temps c’est une autre histoire. Et la raison pour laquelle l’Interceptor aurait ma préférence, certainement.
Au fil de ce voyage, j’ai également pas mal apprécié : les compteurs bien lisibles, les rétros qui font leur job, la sonorité de l’échappement… Certes il n’est pas d’origine ici ; néanmoins autant que je me souvienne de base il est déjà séduisant (par contre lourd visuellement). Béquille, commodos, leviers, pédales… Je valide en outre l’ergonomie générale. Quant à la maniabilité, pour finir, elle m’a épargné de me gameller dans les chemins forestiers !
Par conséquent la RE six-et-demi est une moto agréable à vivre, et accessoirement économe ! La consommation est indéniablement ce qui m’a le plus étonné. Pensez donc, sur tout le séjour, pas une fois je n’ai su dépasser les quatre litres au cent de moyenne. Et pourtant, sur certaines portions je me suis un peu lâché… Alors dans une période où le sans-plomb flirtait allègrement avec les deux euros, j’ai ressenti ce caractère de chameau comme un argument massue.
En définitive, si je devais acheter une néo-rétro neuve, aujourd’hui, la probabilité de voir mon choix porter sur une Royal Enfield 650 Interceptor est quasi de 100%. Economique à l’achat comme à l’usage, elle n’en est pas moins jolie à regarder, sympa à conduire, voire fun à piloter.
Bien sûr, elle ne rivalisera pas en terme de perfs avec les roadsters du moment (lesquels compromettent trop facilement nos permis). Toutefois je persiste à dire que pour une machine compatible A2, elle délivre un agrément surprenant. Malgré sa cylindrée modeste, elle n’oblige pas à taper dans les tours ni à jouer constamment de la boîte. Au contraire, elle offre aux régimes usuels les accélérations et les reprises que j’attends personnellement de ce genre d’engin. Voilà une moto simple, sobre, mais néanmoins plaisir. Bref, sous ses airs vintage, voilà une bécane taillée pour notre époque.